Pour
toutes les raisons du monde, le système politico-économique sous lequel on
vit n’est pas simplement injuste, autoritaire et fascisé, il est
complètement pourri et en faillite.
L’investissement dans la repression étatique (à travers la construction
d’un régime d’urgence continu, le développement d’une armée policière
d’occupation face à toute mobilisation, l’attaque violente contre des
manifestations, des grèves et des luttes comme celle des femmes de ménage,
les blessures extrêmement graves de manifestants comme celle de G. Kafkas,
le lock out dans les universités, la persécution de villages entiers sur la
base de la loi “anti”-terroriste, comme c’est le cas en Chalcidique, les
invasions policières et les évacuations d’espaces de lutte occupés, les
tortures de militants arrêtés, les camps de concentration de réfugiés, les
pogroms rascistes de la police et de para-étatiques de l’Aube Dorée, la
suppression de l’asile politique revendiqué par les réfugiés syriens en
lutte, les prisons spéciales d’isolement pour les prisonniers politiques et
les prisonniers insoumis jusqu’au refus, à Iraklis Kostaris et au gréviste
de la faim Nikos Romanos, de permissions de sortie pour suivre leurs cours
universitaires) et
l’intensification du pillage capitaliste aux dépens de la société et de
la nature dans des conditions de contrôle politique et économique
supranational (l’attaque féroce aux couches plébéiennes de la société, la
suppression massive de l’accès aux soins médicaux, au logement et à
l’éducation, les licenciements, le chômage, la pauvreté et la misère qui
s’intensifient avec les nouvelles mesures d’austérité)
sont des aspects d’un système politico-économique qui ne se trouve pas
simplement en crise mais en décomposition.
Ce qui est en jeu n’est pas la chute du gouvernement actuel par la voie
électorale -comme le proclame la Gauche de régime- ni son remplacement par
un autre gouvernement pour la gestion alternative de la crise et de la
faillite du système, mais le renversement radical de ce dernier par ceux
d’en bas, par la base plébéienne de la société.
C’est cette perspective que s’efforcent d’étouffer violemment les fascistes
qui nous gouvernent, descendants des collaborateurs des nazis, en commun
avec les pitoyables résidus néolibéraux de ce qu’était la social-démocratie
dans la période d’après la chute de la dictature, oscillant entre la peur de
perdre leurs privileges et leur mépris pour la société, entre leur
insécurité et l’arrogance du pouvoir qui les habite.
C’est cette perspective que la Gauche de régime se charge de conjurer, en
essayant systématiquement de manipuler les resistances sociales et de classe
et de spéculer sur elles et en présentant sa propre gestion du pouvoir comme
l’accomplissement pretendu de leurs aspirations. C’est pourquoi, avec une
hypocrisie excessive, elle se pose aujourd’hui comme un défenseur fervent du
droit de N. Romanos à l’éducation, en contraste avec le silence dont elle a
fait preuve à l’égard de la lutte livré par Iraklis Kostaris qui avait
exactement la même revendication. C’est pourquoi aussi elle continue,’à
l’occasion de la grève de faim de N. Romanos, de déformer et de priver de
son sens la révolte de décembre 2008, en en projetant une image qui
l’arrange : celle des “enfants en colère”. Il s’agit d’ailleurs de sa
politique à l’égard de toute lutte, petite ou grande : elle se présente
comme le sauveur de ceux qui souffrent de la brutalité étatique et
capitaliste. Mais quand les gens en lutte contestent son rôle de sauveur
prometteur et s’auto-organisent, agissent sans médiation et de manière anti-institutionnelle,
quand non seulement ils envahissent les rues, mais aussi posent des contenus
politiques qui n’obéissent pas à ses plans, comme le font les anarchistes,
alors elle parle de “provocateurs” et n’hésite pas même à présenter des
manifestants comme des “flics en civil” (comme elle l’a récemment fait à
l’occasion de la manif antifasciste à Keratsini un an après l’assassinat de
Pavlos Fyssas.)
Pour le passage de la révolte à la révolution sociale
La révolte sociale de décembre est vivante en tant que projet, non pas en
termes de répétition mais en termes de dépassement par les gens en lutte
dans une perspective révolutionnaire
Décembre nous a montré que nous ne devons pas désespérer, nous résigner ou
nous individualiser, qu’il ne suffit pas simplement de protester. Nous
pouvons et nous devons nous soulever et contre-attaquer de manière
collective et determinée. L’assassinat d’ Alexandros Grigoropoulos par la
police a déclenché l’explosion de la colère sociale pour toute la violence,
l’injustice et les humiliations résérvées aux opprimés par les patrons
politiques et économiques. La révolte de décembre a prouvé qu’au sein de la
société il y a des forces saines, sensibles et vivantes, capables de
terroriser les patrons et de menace les fondements du régime, en envoyant
aux poubelles des conceptions sur “la fin de l’histoire” et des
généralisations sur “une société morte d’esclaves volontaires et de soumis”.
Elle a donné une impulsion et elle a animé des démarches auto-organisées qui
ont transféré l’inspiration de la révolte dans la vie quotidienne de la
lutte, dans le champ du travail et du quartier. Elle a éclairé un long
parcours de luttes sociales et de classe en Grèce, ainsi que leur connexion
avec des résistances dans les quatre coins du monde, depuis la lutte des
Zapatistes au Méxique jusqu’aux résistances au sein des métropoles
occidentales et a constitué un point de référence pour des révoltes avec
lesquelles elle continue de se croiser jusqu’à aujourd’hui, depuis le
printemps arabe à Tunis et au Caire jusqu’à Istambul et Ferguson.
Décembre a confirmé le mot d’ordre “la révolte n’est pas une utopie”. Or,
notre utopie ne s’arrête pas au déclenchement de la révolte spontanée. Elle
n’est animée par rien de moins que la révolution sociale, le renversement
total de l’Etat et du capitalisme et la construction d’une nouvelle société
sans classes, d’une société d’égalité, de solidarité et de liberté.
La révolte sociale de décembre et toutes les grandes mobilisations
combatives dans les annéees qui ont suivi jusqu’au 12 février 2012 nous ont
ont aussi montré que, dans cette perspective, les éclatements spontanés,
éphémères et non organisés de notre colère juste ne suffisent pas, mais que
l’autoorganisation politique, sociale et de classe est indispensable pour
planifier, développer et donner une continuité à nos actions. Le
rassemblement de forces circonstanciel sur un front de lutte ne suffit pas :
la durée, la rencontre continue des luttes d’en bas et la création de
nouveaux fronts pour élargir le conflit à tous les aspects de la barbarie
étatique et capitaliste sont nécessaires. Pour vivre dans une société sans
patrons, flics et fascistes, sans prisons ni frontières, sans exploitation
ni oppression, il faut prendre complètement notre vie en main. Il ne suffit
pas seulement de résister, nous devons aussi vaincre!
Nous appelons tous les gens en lutte qui sont dans les rues, travailleurs,
jeunes, chômeurs, autochtones et immigrés, à repousser toute logique de
médiation, et toute illusion parlementaire et à s’auto-organiser en
structures de lutte politiques, sociales et de classe (collectifs,
assemblées de quartier et syndicats de base) sur une base anti-hiérarchique,
horizontale et anti-institutionnelle.
Solidarité aux occupations dans les universités, à l’occupation du bâtiment
de la Confédération Générale de Travailleurs de Grèce, de mairies et de
bâtiments publics et à tout espace occupé et autogéré de lutte. Solidarité
aux grévistes de la faim et à tous ceux qui luttent d’en bas!
Pour la révolution sociale, l’anarchie et le communisme!
Collectif anarchiste “Cercle du Feu”
6 décembre 2014
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